MAFTO

Les objectifs fixés par la MAFTO sont doubles :

Il s’agit, au plan scientifique, de procéder à une exploration systématique (études, relevés, fouilles et analyses) du Ramesseum (temple de millions d’années de Ramsès II), afin de comprendre le fonctionnement liturgique et économico-administratif de cette grande fondation bâtie sur près de dix hectares, au XIIIème siècle avant notre ère, sur le territoire thébain. L’intérêt principal de ces recherches est de parvenir à une plus juste définition de ce que l’on appelle encore aujourd’hui, de manière trop restrictive, un temple « funéraire ». C’est la raison pour laquelle, les priorités ont été données à l’analyse de l’architecture et du programme iconographique de ce monument, mais aussi à une fouille complète de ses vastes dépendances dont les structures sont fort heureusement conservées. Déterminer les différents rituels que l’on y célébrait à l’occasion des cultes quotidiens et des fêtes annuelles, mais aussi identifier avec précision les quartiers économiques et administratifs qui en constituaient les dépendances immédiates, sont autant d’axes de recherche qui permettront de rétablir la véritable signification de ces grands temples de Thèbes-Ouest. Mais, comme tout site archéologique en Égypte, le Ramesseum est implanté dans une aire qui avait été occupée avant sa construction. C’est dire qu’il est également nécessaire de prendre en considération certaines époques antérieures à son existence et qui ont laissé, sur le terrain, d’importants vestiges. Plusieurs nécropoles de la Deuxième Période Intermédiaire et du début du Nouvel Empire y ont été identifiées, de même que des installations artisanales contemporaines de la fin de la XVIIIème dynastie. Après l’abandon du temple, à la fin de l’époque ramesside, son périmètre a été de nouveau envahi par une immense nécropole datant de la Troisième Période Intermédiaire, avant que l’édifice soit, plus tard encore, transformé en église par les premiers chrétiens. Ce sont autant de séquences de l’histoire du site, importantes également, qui viennent s’inscrire dans une histoire plus générale qui est celle de Thèbes-Ouest. Dans ce cadre, la présence de disciplines, autres que l’égyptologie, s’est avérée incontournable. C’est la raison pour laquelle des programmes communs ont pu être envisagés et mis en oeuvre au sein de l’UMR 171 du CNRS, à laquelle est rattachée la MAFTO. Ces programmes, qui réunissent chimistes et égyptologues, portent sur deux thématiques : d’une part, sur l’analyse et l’étude des pigments, enduits et mortiers, afin d’identifier, dans un premier temps, les matières et composés utilisés dans l’ancienne Égypte. Il s’agit là, notamment à partir de la construction du temple de Ramsès II et de ses transformations successives au fil de temps, de pouvoir établir l’évolution des techniques employées par les constructeurs et les décorateurs, entre le Nouvel Empire et l’époque romaine, voire chrétienne. Cet axe de recherche sera même sans doute amené à s’étendre aux nécropoles antérieures et postérieures qui ont occupé les lieux, en raison des importants vestiges qu’elles ont laissés. Il nous faut également insister sur les liens à établir, pour l’époque de Ramsès II, entre les hommes et leur lieu d’activité, ce qui explique encore que bon nombre de tombes de fonctionnaires du Ramesseum, sises dans la nécropole thébaine, doivent mériter une attention particulière. D’autre part, la fouille entreprise dans tout le complexe économique du temple a permis de rassembler, au fil des missions, de très nombreux résidus de matière organique, souvent encore in situ dans les abondants récipients découverts sur les lieux. On sait que beaucoup de produits, substances et denrées provenaient des officines et des domaines royaux, pour être entreposés dans les magasins du temple avant d’être redistribués selon les besoins. Il existait également certaines matières étrangères à l’Égypte qui convergeaient vers la Vallée du Nil, dans le cadre d’échanges. L’identification de ces résidus organiques provenant de substances ou de produits locaux ou importés, ainsi qu’une cartographie reflétant leurs lieux d’origine, permettraient d’enrichir considérablement notre connaissance des relations commerciales que l’Egypte de cette époque entretenait avec les contrées étrangères, proches ou lointaines. Un autre volet des recherches de la MAFTO, concerne la tombe de Ramsès II (KV.7) qui constitue un monument indissociable du temple de millions d’années du grand roi. Sa fouille est en cours, et a déjà permis de rassembler d’importants résultats, notamment sur la conception architecturale de la structure souterraine, sur le programme iconographique des chambres et corridors, et sur le mobilier funéraire royal qui a été retrouvé au fil des missions. Un important projet de sauvegarde de cette sépulture est actuellement à l’étude.

Le deuxième objectif de notre Mission concerne la valorisation des recherches et des sites en cours d’étude. Cette facette comprend notamment des opérations de conservation, de protection et de restauration des zones fouillées, et s’inscrit dans un programme de sauvegarde du patrimoine. Site classé par l’Unesco, le temple de Ramsès II fait l’objet d’efforts particuliers qui ont déjà permis la réalisation d’un certain nombre d’interventions appréciées par les autorités égyptiennes du CSA : nettoyage des colonnes de la grande salle hypostyle, protection de structures en brique crue de plusieurs quartiers du complexe économico-administratif, restauration des escaliers et des piliers osiriaques de la deuxième cour, pose de dallages dans les différentes salles du temple, etc. Ces travaux, qui font appel à des spécialistes français, se déroulent dans le cadre d’une efficace coopération avec nos partenaires, et permettent notamment la formation, sur le terrain, de techniciens égyptiens (tailleurs de pierre, restaurateurs). L’action-pilote conduite au Ramesseum est également à l’origine d’une collaboration établie avec le Centre de la cartographie archéologique du Conseil Suprême des Antiquités (EAIS/CSA), pour la mise en oeuvre d’un projet de protection de l’environnement du site. Dans ce contexte prennent place également toutes les nouvelles technologies appliquées à l’archéologie, améliorant sensiblement les méthodes traditionnelles de relevés topographiques et iconographiques, ou encore l’étude et le rendu d’éléments architecturaux ou statuaires. L’utilisation de scanners, de radars, voire la mise en oeuvre d’un SIG ou de restitutions en 3D, permettent aujourd’hui d’orienter, grâce à des partenariats nationaux ou internationaux, la recherche vers de nouveaux horizons et de nouvelles voies à explorer, utiles de surcroît pour des projets de sauvegarde et de valorisation.